Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/349

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de blés de Turquie et autres grains dont on fait des gâteaux minses qu’on nomme Tchapaty. On les cuit sur des charbons ou sur une plaque de fer échauffée ; c’est tout d’un coup fait. Deux fois la semaine il se régalera avec du gros ris ; c’est une fête pour toute la famille. La boisson ordinaire c’est de l’eau, mais comme il n’y a pas d’endroit dans le monde ou il n’y ait quelque liqueur enyvrante, on fait ici une racque [araque] extrêmement forte avec des grains fermentés, une espèce de Jagre qui est un sucre noir tiré de certaines cannes beaucoup plus minces que celles dont on tire le sucre blanc, et qu’on fait bouillir avec d’autres ingrédiens. Les Maures et Gentils, les militaires surtout boivent de la M.nt..gue pour s’engraisser et se fortifier. C’est le beurre commun bouilli avec de l’huile ; on y mêle aussi de la graisse. Le tout fait une espèce de bouillie jaune, épaisse, dont on fait sa provision dans toutes les maisons. Cette drogue entre dans tous les ragoûts et fait une bonne frîture. Lorsqu’on veut en boire, on en chauffe une petite quantité dans une tasse ; on y mêle du poivre, du gingembre et autres épiceries. Cela fait une boisson qui, je crois, n’est pas bien agréable, mais elle fortifie et engraisse. Comme ils ont l’idée dans l’Inde qu’on ne peut être bon guerrier si on n’a un certain embonpoint, tous les militaires en boivent une ou deux tasses par jour. J’ai vu des Maures qui en étoient aussi yvres que s’ils avoient bu une chopine d’eau de vie.