Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/374

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sons et reflexions faites, l’on s’étoit persuadé qu’ils contenoient le cazana du Bengale ; car, pour des munitions de guerre, on ne pouvoit s’imaginer qu’on eût pris tant de soins. Quoi qu’il en soit, j’étois de mauvaise humeur, je reçus très mal l’envoyé qui me quitta en disant que nous allions voir beau jeu. Nous entendîmes, un quart d’heure après quelques coups de fusils tirés de l’autre côté de la rivière. J’envoyai reconnoitre, mais rien ne paroissoit ; nous nous mîmes en marche. À la pointe du jour, je ne vis personne qui nous suivoit ; mais la tête de nos équipages fit halte et j’entendis beaucoup de bruit. Nous étions précisément à ce fort dont le barbier nous avoit parlé, auprès duquel étoit le grand chemin ; l’ayant bien examiné, je vis qu’il falloit ou nous en rendre maitres, ce qui n’étoit pas aisé, ou quitter le chemin. Le fort à la vérité n’avoit point de canons, mais il paroissoit plein de gens armés de fusils et portoit aussi de ces grosses caitoques d’un quarteron et même d’une demie livre de balles. Sur la droite du chemin étoit une belle plaine de terre cultivée dont nous n’étions séparés que par une chaussée assés large ; nous la coupâmes sans perdre de tems, pendant que notre canon répondoit aux gens du fort et rallentissoit leur feu. Les équipages défilèrent et se mirent hors de portée du fort sans accident. Une petite balle de fer me frappa à la botte et passa entre les doigts du pied et la semelle, où elle s’arrêta : elle me causa un engourdissement qui