Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/426

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deux hommes furieux de ne pouvoir en venir à bout et craignant les suites lui coupèrent le col. Personne d’abord ne parla ni pour ni contre eux ; on étoit curieux de savoir ce que nous en ferions : mais dès qu’on sçût qu’ils étoient condamnés à mort, je vis venir de tous côtés les instances les plus fortes pour ne point passer à l’exécution. Le raja et tout ce qu’il y avoit de plus grand s’intéressoient pour leur sauver du moins la vie. Malgré cela, au défaut de bourreau [pour les pendre], nous les fîmes fusiller et ce ne fut à cette occasion pendant plusieurs jours que des compliments sur notre exactitude à rendre justice. Cette pauvre femme à qui il semble que la Providence n’avoit conservé la vie que pour faire punir ses assassins mourut le lendemain de l’exécution, malgré tous les soins de nos chirurgiens.

Il n’étoit pas possible que le voisinage d’une espèce d’hommes comme nous ne causât d’abord quelque alarme dans les familles de Choterpour. [On n’y avoit jamais vu d’Européens.] On ne savoit qui nous étions ; mahométans ? Il n’y avoit point de doute la dessus, puisque nous n’étions pas gentils et que ces bonnes gens n’avoient jamais entendu parler d’une religion chrétienne ; mais étions nous Mogols, Patanes, Arabes ou Tartares ? c’étoit la question et l’on avoit bien peur que nous ne fussions quelque chose de pire que tout cela. Il nous restoit malheureusement trois ou quatre bouteilles de vin rouge que nous n’eûmes pas la