Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/461

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Mahmoudcoulikhan que je trouvai étendu sur un cadre n’en pouvant plus de fatigues. Il pouvoit à peine me parler, la rage, le désespoir étoient peints sur son visage. Je voulus l’engager à rester encore vingt quatre heures, il me dit que tout son monde étoit hors de combat, que les chefs de l’armée l’avoient fort mal soutenu, que d’ailleurs l’armée angloise arrivoit ce jour même et qu’il n’avoit plus de munitions. La moitié des troupes avoit déjà défilé, nous restâmes pour faire l’arrière-garde, ce qui sauva les grosses pièces d’artillerie. Toute l’armée fut camper à sept cosses au dessus de Patna.

Le lendemain je fus voir le chazada qui me reçût très bien et témoigna qu’il étoit au désespoir des ordres qu’on m’avoit donnés de rester derrière, rejetant tout sur Mahmoudcoulikhan à qui on avoit fait entendre que s’il abandonnoit les François, il éviteroit toute opposition de la part des Anglois. Je vis aussi que la jalousie de Mahmoudcoulikhan contre moi entroit pour beaucoup dans sa conduite. Il avoit voulu avoir tout l’honneur de l’entreprise ; sachant que j’étois très bien avec le prince, il avoit craint que je ne l’eusse supplanté. Quoiqu’il en soit l’affaire étoit manquée. Le mal au reste étoit peu de chose, si notre escadre, nos forces de la côte avoient pu paroitre dans le Bengale, dans tout le mois d’Avril ; car enfin je n’avois d’autre but en partant de Choterpour que de procurer une diversion, me flattant que Madras auroit