Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/523

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garkhan, et à quelques autres chefs étoient assés bien payés, le reste ne recevoit pas un sol ; les chevaux n’étoient que des bidets ; les armes, les munitions de toutes espèces manquoient.

Sur l’avis reçu, le prince me fit appeller. Je lui dis naturellement que nous étions dans une très mauvaise position, qu’il falloit décamper ce jour même, que puisque par les négociations qui avoient été entamées, il n’y avoit eu rien de terminé jusqu’à présent, la marche de l’ennemi prouvoit assés qu’il vouloit en venir à la voye des armes, et qu’en ce cas j’osois l’assurer par tout ce que j’avois apperçu, que son armée seroit battue et mise en déroute, que le seul parti pour lui étoit de s’éloigner et de forcer l’ennemi à traiter de loin, jusqu’à ce qu’il se présentât quelque occasion favorable dont on put profiter. L’empereur ne dit mot ; Camgarkhan, à qui mon sentiment ne plaisoit pas, soutenu de trois ou quatre chefs ses confidents, me dit avec chaleur qu’il falloit combattre si l’ennemi se présentoit, que l’armée de l’empereur étoit en état de le repousser, qu’il n’y avoit pas un seul homme qui ne fut décidé à sacrifier sa vie pour son service et sa gloire. Il tint vingt propos dans ce goût, ajoutant qu’au surplus on auroit toujours le tems de se retirer s’il le falloit, que d’ailleurs il étoit plus que probable que Cassimalikhan et les Anglois ne venoient que pour arranger les affaires à l’amiable et à la satisfaction de l’empereur. Le prince prenant malgré lui un air gai