Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/619

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

idolâtres eux-mêmes, puisqu’ils savent de quoi il est question, sont bien plus coupables que le peuple, par l’erreur criminelle dans laquelle ils se plaisent à l’entretenir, avec toutes les histoires abominables qu’ils ont forgées, en multipliant les figures des attributs ; cet aveuglement est la pierre angulaire de leur autorité qui les met à portée de s’enrichir, et de vivre délicieusement aux dépens des créatures qui leur sont soumises. J’ai dit quelque part que leur habillement de cérémonies, celui surtout avec lequel ils doivent se présenter le plus décemment devant leurs idoles, étoit un simple morceau de toile autour des reins, le reste du corps nu, mais orné de leurs bijoux. Si la prière doit se faire avec ferveur et enthousiasme, le morceau de toile tombe, en un mot la prière la plus agréable à la divinité, celle qui est le plutôt exaucée doit se faire étant tout nu. Pourquoi cette institution ? Elle ne vient que du libertinage des Brames qui ont la charge des temples, ou pagodes, dont la partie la plus intérieure (dérobée aux yeux des curieux, n’étant éclairée que par la foible lumière d’une seule lampe) est souvent visitée par les femmes, les filles du peuple qui ont des vœux à accomplir, des prières, des offrandes à faire. Je me souviens que parmi bien des lettres que j’étois quelquefois obligé d’intercepter dans la dernière guerre, j’en trouvai une qui me surprit beaucoup ; c’étoit une femme du Bengale qui ecrivoit à son mari qui étoit allé du côté de Dehly, qu’elle l’attendoit avec la plus grande impatience, que son retour ne pouvoit tarder ayant, pour l’obtenir, prié dans la pagode toute nue ; la conséquence est qu’elle a dû passer par les mains de quelques jeunes Brâmes qui auront voulu la sanctifier.

On pourroit pousser le raisonnement bien plus loin que j’en ai fait, pour justifier les Indiens de l’idolâtrie dont on les accuse.

Ils adorent Brimh (Dieu) et ses attributs sous les