Page:Martinov - De la langue russe dans le culte catholique, 1874.djvu/53

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langage en est tellement boursouflé, le flux des paroles si exubérant, qu’on a toutes les peines du monde d’en dégager les pensées que l’auteur a voulu exprimer. On dirait qu’il a horreur de la clarté et du naturel. D’ailleurs, la plupart des considérations, noyées dans une phraséologie diffuse, sont puisées dans le fond commun du parti slavophile, dont M. Bezsonov est un des adeptes les plus ardents, et dont il partage par conséquent les errements et les exagérations.

Laissant de côté les réflexions qu’il développe longuement sur l’inefficacité de la mesure en question, sur les maux imaginaires que causerait le maintien du polonais, ne fût-ce que dans un seul verset, d’un hymne quelconque ou dans une seule page de sermon, arrêtons-nous à celles qui lui sont particulières ou auxquelles il a donné un plus grand relief.

Ainsi que ses trois autres collègues, M. Bezsonov s’oppose formellement à la substitution du russe au polonais, quelque hostile qu’il se montre envers ce dernier. « Ce serait, dit-il avec raison, quitter le terrain de la politique ou de la littérature et entrer sur celui de la religion et de l’Eglise » On le sait, un des griefs les plus graves que le parti slavophile, d’accord en cela avec les starovères, ne cesse de formuler contre le pouvoir séculier, c’est son ingérence dans les affaires de la conscience et ses empiétements sur l’autorité spirituelle de l’Église.

M. Bezsonov parle aussi des dangers qui en résulteraient inévitablement pour l’Eglise officielle ; mais il insiste d’une façon particulière sur les difficultés inhérentes à la traduction des livres catholiques et qui lui paraissent presque insurmontables.

C’est tout un traité qui remplit près de la moitié de son mémoire et qui tend à prouver que, pour accomplir cette tâche, il faudra d’abord créer une langue à part, ce qui demanderait les efforts réunis des université, et des académies entières ; qu’il faudrait en second lien, établir une académie spéciale et entreprendre ce travail égyptien avec le concours de centaines des meilleurs écrivains, durant un siècle et plus.

Qu’il y ait de l’exagération, c’est ce dont nous convenons volontiers. On ne peut pas cependant méconnaître que le fond de la difficulté ne soit vrai. La littérature catholique en langue russe est réellement encore à créer. « Notre langue profane, écrit