Page:Marty-Laveaux - Études de langue française, 1901.djvu/263

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
255
ESSAI SUR LA LANGUE DE LA FONTAINE

« La graisse d’oye, ou de canard, ou de poulaille, est propre pour lenir et addoucir l’aspérité du cuir[1]. » Quelquefois, il l’étend à des animaux qui ne font point ordinairement partie de la basse-cour : « Les canards, les cicoignes, les hérons, les paons, les coqs d’Inde et autres poulailles mangent et vivent de crapaux, vipères, aspics, couleuvres, scorpions, araignes, chenilles et autres bestes venimeuses[2].

Ce qu’il y a de certain d’après ces exemples, c’est que M. Lorin, en expliquant ainsi ce terme : « Poules réunies dans une basse-cour », a donné une définition des plus incomplètes.

La Fontaine a dit en parlant de l’araignée :

Le pauvre bestion tous les jours déménage[3].
et ailleurs :

La sœur de Philomèle, attentive à sa proie,
Malgré le bestion, happoit mouches dans l’air[4].

À l’occasion de ce dernier passage, M. Walckenaer fait la remarque suivante : « Ce mot n’appartient pas, comme on l’a dit, à notre vieux langage ; il est dérivé de l’italien : mais au lieu d’être, comme dans cette langue, un augmentatif, notre poète en fait un diminutif. Il bestione signifie, en italien, une bête grosse ou grande. Dans la première édition du Dictionnaire de l’Académie française, on trouve cependant le mot bestions, mais au pluriel seulement ; il est dit que ce mot signifie particulièrement des bêtes sauvages, et qu’il ne s’emploie guère qu’en parlant des tapisseries qui représentent ces sortes de bêtes, tapisseries de bestions. »

Cette remarque n’est pas exacte. Ce n’est point La

  1. XIX, iii, p. 550.
  2. XXI, iv, p. 566.
  3. Liv. III, fab. viii, 26.
  4. Liv. X, fab. vii, 15.