Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/118

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lard de l’abstraction productrice de fiction. Comme nous l’avons vu dans sa totalité cela n’intervient que lorsque l’on considère l’organique[1].


[Hasard et possibilité chez Épicure]


Remarquons que, comme l’âme périt et ne doit son existence qu’à une mixture fortuite, on admet du même coup, d’une façon générale, le caractère fortuit de toutes ces représentations (ex. l’âme), qui, de même qu’elles n’ont aucune nécessité dans la conscience commune, chez Épicure également sont substantifiées comme des états fortuits, lesquels, conçus comme donnés dont la nécessité, la nécessité de leur existence, non seulement n’est pas démontrée mais n’est pas démontrable, ne sont connus que comme possibles. Ce qui persiste par contre est le libre être de la représentation, qui, d’une part, est la liberté dans son être en soi, mais qui, d’autre part, en tant que pensée de la liberté du représenté, est un mensonge et une fiction, et donc une chose en elle-même inconséquente, un mirage, une fantasmagorie[2]. Cet être est plutôt l’exigence des déterminations concrètes de l’âme comme pensées immanentes. La grandeur d’Épicure, ce qui persiste de lui, c’est qu’il ne donne aux états aucune priorité sur les représentations et cherche tout aussi peu à sauver celles-ci. Chez Épicure, le principe de la philosophie consiste à démontrer que le monde et la pensée sont pensables, possibles ; la preuve qu’il apporte, le principe d’où cela est tiré et où cela est ramené est encore la possi-

  1. . C’est la pensée de l’uniformité et de la mesure qui est définie ainsi. Pour la « belle âme », il n’y a que des différences, donc tout est pareil. La dialectique doit commencer par réintroduire la différence masquée. L’identité immédiate, c’est l’identité trompeuse de la représentation et non l’identité concrète des troisièmes termes dialectiques. Marx reprend à ce sujet la critique portée par Hegel contre Schelling.
  2. . La liberté de la représentation est celle de la conscience abstraite qui a son principe dans la possibilité formelle, régie par le seul principe de non-contradiction. La fiction consiste, pour cette conscience, à projeter son être-libre dans l’objet de la représentation (das vorgestellte), à se donner comme la nature. Cette projection crée le monde contradictoire qui ressemble à la conscience abstraite. Épicure ne s’en tient pas à cette projection, il pense également l’idéel, mais sans penser ensemble les deux moments contradictoires.