Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/172

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cure : elle cherche l’absence de présupposition dans le monde de la présupposition substantiale, ou, en langage logique : comme l’être pour soi est son principe exclusif et immédiat, elle a immédiatement en face d’elle l’être-là, elle n’a pas surmonté logiquement cet être-là. C’est ainsi qu’on dévie du déterminisme en élevant au rang de loi le hasard, la nécessité, l’arbitraire ; le Dieu dévie du monde, le monde n’est pas pour lui, et c’est pour cela qu’il est Dieu.

On peut donc dire que la declinatio atomi a recta via (déclinaison de l’atome de la ligne droite) est la loi, le pouls, la qualité spécifique de l’atome ; c’est pourquoi la doctrine de Démocrite est une philosophie tout à fait différente, non une philosophie du temps comme l’était celle d’Epicure.

quod nisi decinare solerent, omnia deorsum,
… codèrent perinane projundum,
nec offensus natus nec plaga creata
principiis : ita nihil umquam natura creasset[1]

[Lucr. II 221 sqq.]

Tandis que le monde se crée, tandis que l’atome se rapporte à soi, c’est-à-dire à un autre atome, son mouvement n’est pas celui que soumet un être autre, celui de la ligne droite, mais celui qui en dévie, celui qui se rapporte à lui-même. Représenté matériellement, l’atome ne peut se rapporter qu’à l’atome, chacun des atomes déviant de la ligne droite.


[Extraits de Lucrèce II 243-245. 251-258. 281 sq.]


La declinatio a recta via est l’arbitrium (détermination arbitraire, puissance, choix libre), la substance spécifique, la véritable qualité de l’atome. [Extraits de Lucrèce II 284-293.]

  1. . S’ils ne déclinaient pas ainsi, tous / tomberaient tout droit en bas, dans le vide profond. / Aucune rencontre ne serait née entre eux et les corps primordiaux / n’auraient subi aucun choc : jamais dans ces conditions la nature n’aurait créé.