Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/187

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Enfin, ce n’est pas un défaut de Platon, une unilatéralité d’attribuer cette force de rédemption en dernière instance à la philosophie : c’est l’unilatéralité qui en fait un philosophe et non un professeur de croyance. Ce n’est pas une unilatéralité de la philosophie de Platon, mais ce par quoi elle est, elle et elle seule, philosophie. Elle est ce par quoi Platon supprime à nouveau la formule qu’on vient de blâmer d’une mission de la philosophie qui ne serait pas la philosophie elle-même.

« Ici donc, dans le désir de donner à ce qui est connu au moyen de la philosophie une base indépendante de la subjectivité de l’individu singulier, se trouve aussi la raison pour laquelle Platon, au moment précis où il développe des vérités qui ont le plus haut intérêt moral et religieux, les présente aussitôt sous une forme mythique. » (p. 94.)

Il reste à savoir si de cette manière on a déterminé quoi que ce soit. Le noyau implicite de cette réponse n’est-il pas la question demandant la raison de cette raison ? On se demande, en effet, pourquoi Platon éprouve le désir de donner à ce qui est connu par la philosophie un statut positif, avant tout mythique ? Un tel désir est la chose la plus extraordinaire qui puisse être dite par un philosophe, quand il trouve la puissance objective non dans son système lui-même, dans la puissance éternelle de l’idée. C’est pourquoi Aristote dit que créer des mythes, c’est créer des sentences.

Sur un plan extérieur, nous pouvons trouver la réponse à cette question dans la forme subjective du système platonicien, la forme du dialogue, et dans l’ironie. Ce qui est jugement d’un individu et se fait prévaloir comme tel, en opposition à des opinions ou à des individus, a besoin d’un point d’appui grâce auquel l’incertitude subjective devienne la vérité objective.

Mais la question se pose en outre de savoir pourquoi cette création de mythes se trouve dans les dialogues qui développent de préférence des vérités d’ordre moral et religieux, tandis que le Parménide, qui est purement métaphysique, en est exempt. On se demande pourquoi le fondement