Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/233

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La nécessité apparaît, en effet, dans la nature finie comme nécessité relative, comme déterminisme. La nécessité relative ne peut qu’être déduite de la possibilité réelle, ce qui veut dire que c’est un enchaînement de conditions, de causes, de raisons, etc., qui médiatise cette nécessité. La possibilité réelle est l’explication de la nécessité relative. Et nous la trouvons employée par Démocrite. Nous citons à l’appui quelques passages empruntés à Simplicius[1].

Qu’un homme soit altéré, qu’il boive et retrouve la santé de son corps, ce n’est pas le hasard que Démocrite donnera comme cause, mais la soif. Même si, en effet, il a semblé, à propos de la création du monde, faire intervenir le hasard, il affirme cependant que dans les cas particuliers celui-ci n’est la cause de rien, mais qu’au contraire il renvoie à d’autres causes. Ainsi, par exemple, creuser la terre serait l’origine, de la découverte d’un trésor, ou la végétation la cause de l’olivier.

L’enthousiasme et le sérieux avec lequel Démocrite introduit dans la considération de la nature ce mode d’explication, l’importance qu’il attribue à la tendance à établir des raisons s’expriment naïvement dans cette profession de foi : « Je préfère découvrir une nouvelle étiologie que d’obtenir la couronne du roi de Perse[2] ! »

Une fois de plus, Epicure est directement opposé à Démocrite. Le hasard est une réalité qui n’a que la valeur de la possibilité, mais la possibilité abstraite est justement l’antipode de la possibilité réelle. Cette dernière est enfermée dans des limites rigoureuses, comme l’entendement ; la première est illimitée comme l’imagination (Phantasie). La possibilité réelle cherche à fonder la nécessité et la réalité effective de son objet (Objekt) ; la possibilité abstraite ne s’occupe pas de l’objet qui est expliqué mais du sujet qui explique. L’objet (Gegenstand) doit seulement être possible, pensable. Ce qui est possible selon la possibilité abstraite, ce qui peut être pensé, cela ne se dresse pas sur le chemin

  1. . Simpl. P. 351, 352.
  2. . Euseb. XIV 781.