Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/329

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Hegel s’en prend alors à la déclinaison. Epicure admet comme attribut fondamental des atomes la pesanteur, mais il ne laisse pas les atomes se mouvoir en ligne droite, il les fait au contraire se mouvoir en une ligne qui dévie quelque peu de la droite, en une ligne courbe ; si bien que les atomes se rencontrent et forment une unité qui n’est que superficielle et ne leur est pas essentielle[1]. Autrement dit : Epicure nie en général tout concept et il conteste l’universel comme essence (p. 490). Toutes les naissances sont des combinaisons fortuites, qui se dissolvent avec la même fortuité. Car le divisé est l’élément premier et ce qui est effectivement ; et la fortuité est la loi de la combinaison.

Epicure bannit la pensée comme être-en-soi, sans avoir à l’esprit que ses atomes eux-mêmes ont justement cette nature d’être des objets de pensée, qu’ils ont un tel être qui n’est pas immédiat, mais au contraire essentiel de par la médiation, le négatif, ou l’universel. Inconséquence qui est la première et la seule d’Epicure, et qui est toute l’inconséquence des empiristes (p. 491). C’est de la même manière que les stoïciens font du pensé, de l’universel, l’essence et sont tout aussi incapables d’obtenir l’être et le contenu, tout en le possédant en même temps de manière inconséquente.

Après la métaphysique, la physique. Epicure s’oppose à un but ultime et universel du monde, à la téléologie de l’organique en lui-même, et aux représentations théologiques de la Sagesse d’un Créateur présente au monde ; cela va de soi étant donné qu’il supprime l’unité de quelque manière qu’on se la représente. Tout est événement, déterminé par le rassemblement fortuit, extérieur des figurations des atomes. Ce serait le hasard, la nécessité extérieure qui est le principe de toute union, de toute relation mutuelle (p. 491).

  1. . On voit que Hegel accepte l’explication de la déclinaison qui sera âprement critiquée par Marx. Ce point est essentiel : les Travaux préparatoires commencent par reprendre Hegel pour critiquer la faiblesse de la « construction du monde » d’Epicure, avant que l’analyse positive de la déclinaison ne vienne rendre raison de ce passage contradictoire, sinon en résoudre la contradiction.