Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/332

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grands (p. 501). Epicure a encore posé comme but l’état du Sage, l’ataraxia, un acte de rester-identique-à-soi-même-dans-le-calme, délivré de la crainte et du désir (p. 502). Le Sage ne recherche que le plaisir pris comme quelque chose d’universel, il tient ce seul plaisir pour positif, il y rencontre l’universel et singulier ; autrement dit, le singulier est supprimé dans la forme de l’universalité, est considéré seulement en sa totalité ; tandis que de façon matérielle (ou selon le contenu), Epicure érige en principe la singularité, il exige d’un autre côté l’universalité de la pensée, s’accordant avec le stoïcisme (p. 503).

Hegel insiste donc ici sur la dualité apparente du principe épicurien : singulier et universel. D’un côté l’universel, la pensée, de l’autre le singulier, la sensation, les deux principes étant tout bonnement opposés (p. 503). La sensation n’est pas le seul principe d’Epicure ; ce principe est la félicité gagnée par la raison et ne pouvant être gagnée que par elle : ainsi les deux principes ont le même but[1].

Enfin, les dieux d’Epicure possèdent l’immortalité et la béatitude que la foule leur attribue. Sous cette idée de divin n’est compris rien d’autre que l’universel en général (p. 506). Les dieux peuvent être connus par la raison (ils n’ont pas de passions) [p. 507]. Ils sont pour une part comparables au nombre : ce qu’il y a d’abstrait dans le sensible. Pour une autre part ils sont l’élément formel humain accompli, les images tout à fait universelles qui sont en nous. Hegel commente : cette image universelle, un concret, qui est d’abord représenté comme humain, est la même chose que ce que nous appelons idéal.

  1. . Cette opposition entre le plaisir comme universel et la sensation comme singularité n’est pas retenue par Marx, parce que l’universalité de l’ataraxie est essentiellement liée à l’acte de s’abstraire du monde analysé dans la déclinaison. La déclinaison unit la singularité et l’universalité formelle. Sensation et plaisir renvoient à l’atome singulier déclinant. Dans le premier cas, l’atome est soumis à la matière (être-là), et retenu hors de l’universalité. Mais le Sage, à l’instar des dieux, fait abstraction de l’être-là gagnant l’universalité abstraite du monde des atomes, semblables dans l’acte même qui les voit décliner…