Page:Marx - Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure.djvu/41

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tion de la conscience et du monde, c’est cette opposition qui en s’accentuant provoque le changement révolutionnaire qui aboutit de nouveau à un moment d’union de la conscience et de la substance. Le projet même d’étudier les philosophies grecques en question trouve sa justification dans la pureté de l’analogie selon laquelle ce qu’elles sont à Aristote, les Jeunes hégéliens et Marx lui-même le sont à Hegel.

Mais l’alternance elle-même ne se pense que par la dialectique de Hegel, fondée sur l’opposition. Sur ce point, Marx est formel : le développement de l’histoire n’est pas celui de la mesure. « Une médiocrité qui se donne pour le phénomène de l’absolu est elle-même tombée dans la démesure, en l’espèce la démesure dans la prétention[1]. » L’ironie de la polémique ne doit pas faire oublier le problème : tout accommodement des contraires fait obstacle au développement dialectique de l’histoire. « L’opposition entre la philosophie et le monde doit au contraire s’accentuer pour devenir féconde, car ce n’est que de cette accentuation que peut naître la révolution, la transformation profonde de la philosophie et du monde qui rétablira entre eux une harmonieuse synthèse[2]

Les périodes d’opposition de la philosophie et du monde sont donc les périodes révolutionnaires. La philosophie totale en soi est tombée au rang d’une totalité abstraite et

    comme sens. Soulignons que la théorie de l’alternance ne sera jamais pour Marx unique et souveraine. Nous verrons que la Sainte Famille, et plus encore les Manuscrits de 1844, la soumettent à un processus d’élaboration et d’accomplissement. Dans l’exposition du « mouvement d’ensemble » du capital (le Capital), cette progression devient celle d’un « organisme social donné ». Mais Marx ne cède pas à la tentation de nier l’alternance en faveur d’un accomplissement total et définitif de l’histoire. L’analyse des Manuscrits de 1844 (infra) montrera que la conception marxiste de l’histoire fonde la dialectique de l’accomplissement (aliénation et fin de l’aliénation) dans une dialectique plus profonde de l’objectivation fondée sur l’alternance des rapports homme/nature. Cette seconde dialectique constituant au sens propre l’histoire par opposition à la préhistoire. Ce débat central dialectique/alternance s’origine dans la réflexion présente des textes de 1839-1841.

  1. . Travaux préparatoires, « Points nodaux dans le développement de la philosophie. »
  2. . Cornu, op. cit., I, 187.