Page:Marx - Travail salarié et capital, 1931.djvu/27

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« Halte-là ! » s’écrie maintenant le capitaliste. J’ai loué l’ouvrier pour une journée entière, pour douze heures. Or, six heures ne sont qu’une demi-journée. Donc, bûchez ferme jusqu’à ce que soient terminées également les six autres heures — c’est seulement alors que nous serons quittes ! » Et l’ouvrier doit se soumettre en effet à son contrat accepté « volontairement » d’après lequel il s’engage à travailler douze heures entières pour un produit qui coûte six heures de travail.

Dans le travail aux pièces, il en est exactement de même. Supposons que notre ouvrier fabrique en douze heures douze pièces de la même marchandise. Chacune d’elles coûte 2 marks de charbon et d’usure et est vendue 2 marks 50. Si nous faisons les mêmes hypothèses qu’auparavant, le capitaliste va donc donner à l’ouvrier 25 pfennigs par pièce, cela fait pour douze pièces 3 marks que l’ouvrier met douze heures à gagner. Le capitaliste reçoit pour les douze pièces 30 marks : déduction faite de 24 marks pour la matière première et l’usure, restent six marks dont il paie trois marks et empoche trois marks. Tout comme plus haut. Là aussi l’ouvrier travaille six heures pour lui, c’est-à-dire en compensation de son salaire (demi-heure dans chacune de ses douze heures) et six heures pour le capitaliste.

La difficulté contre laquelle échouaient les meilleurs économistes tant qu’ils partaient de la valeur du « travail », disparaît dès que nous partons de la valeur de la « force de travail » et non de celle du « travail ». La force de travail est, dans notre société capitaliste actuelle, une marchandise comme toutes les autres, mais néanmoins une marchandise tout à fait spéciale. En effet, elle a la propriété particulière d’être une force qui crée de la valeur une source de valeur et notamment, par un traitement approprié, une source de plus de valeur qu’elle n’en possède elle-même. Dans l’état actuel de la production, la force de travail humaine ne produit pas seule-