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Page:Mary - Roger-la-Honte, 1887.djvu/18

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– Jamais… que sur un ordre de toi, mère.

– C’est bien… que Dieu t’épargne la douleur… qu’il me frappe, mais qu’il ait pitié de ta faiblesse et de ton innocence !…

Elle ne pleurait pas. Seulement des sanglots nerveux, en lui montant à la gorge, l’étouffaient.

Elle eut pourtant la force de fermer la fenêtre.

Alors, en revenant près de son lit, elle vit que la femme de chambre, muette et consternée était encore là !

Henriette crut qu’elle allait s’évanouir.

Elle eut la force de dire :

– C’est bien, Victoire… je coucherai moi-même Suzanne.

– Madame n’a donc pas vu ?… entendu ?… là ?… tout près ?…

– Quoi ? qu’y a-t-il ?…

– Un coup de fusil… ou de pistolet !

– Vous êtes folle. Laissez-nous !

– Que Madame me pardonne. J’avais cru…

Et Victoire sortit, toute tremblante. Et Henriette qui se vit dans son armoire à glace, recula effarée tant elle se faisait peur !

Tout à coup des gémissements la firent tressaillir. Elle se retourna, Suzanne venait de tomber sur le tapis de la chambre en proie à des convulsions, se tordant, les yeux blancs, la bouche crispée.

Elle se précipita sur l’enfant qu’elle prit dans ses bras, qu’elle pressa contre sa poitrine, la berçant comme lorsqu’elle voulait l’endormir. Elle la caressait, de la main, sur les joues, sur le front, sur les yeux. Elle la dévorait de baisers ardents et fiévreux.

– Ma fille, ma Suzanne chérie, reviens à toi… ne pleure pas… calme-toi, je t’en supplie… N’aie pas peur… Ne suis-je pas là ! Ma Suzanne adorée, ne me fais pas de chagrin…

Mais Suzanne, secouée par une attaque de nerfs, n’entendait pas. Alors, Henriette mouilla une serviette et tamponna le visage de la petite, le front, le cou. Enfin, elle se calma. Les convulsions cessèrent. Elle revint à la connaissance.