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Page:Mary - Roger-la-Honte, 1887.djvu/22

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Tout cela, la mère et la fille le voient. Sur leur front et dans le creux de leur main roule une sueur froide.

À travers l’obscurité du salon, le regard de Roger s’est dirigé vers la chambre où dort sa femme, où dort Suzanne. Et dans ce regard passe quelque chose d’attendri… Un instant, il hésite… son doigt presse la gâchette… Une plus forte pression de l’index l’enverrait dans l’éternité… Mais il n’ose pas. Il rejette l’arme sur le bureau…

– Le lâche ! murmure Henriette.

Et pendant que Roger se rassied et continue de rêver, elle emporte Suzanne évanouie et regagne sans bruit sa chambre…

La nuit se passe ainsi, Henriette ne se couche pas. Suzanne est dans le lit, mais la fatigue n’a point de prise sur elle… Jusqu’au matin ses yeux restent ouverts, conservant une inexprimable terreur.

Vers huit heures, Henriette l’habille… Puis elle chiffonne le lit, les oreillers, pour ne pas éveiller les soupçons de la femme de chambre… pour faire croire qu’elle s’est couchée… Elle-même s’habille… il faudra bien qu’elle sorte de sa chambre et qu’elle voie son mari… qu’elle lui parle… Elle lui sourira même, afin qu’il ne se doute pas qu’elle a été témoin de son crime. Elle entend Roger qui sort de chez lui. Il traverse le salon, frappe à la porte de sa femme… Elle ouvre. C’est Laroque, en effet, souriant, qui entre… Il n’est pas vêtu comme la veille. Ses vêtements gardaient des traces de la lutte. Cela aurait pu le trahir. Il est en noir.