Page:Masoin - Nadine, 1914.djvu/126

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le veux-tu ? Tu seras ma femme de douceur
Faisant sur nos chemins fleurir toutes les fleurs ?

Et il lui prit la main. Mais Nadine à voix douce
Et le regard humide ainsi que de la mousse
Aux matins de rosée, ayant mis dans son œil
Tous ses rêves éteints et leur robe de deuil
Lui dit :
Lui dit : — Non, Pierre ; enterrons nos amours défuntes :
Je ne puis être à toi ! Regarde-moi : j’emprunte
À l’âge des sillons qui ont ridé mon front,
Je suis vieille et flétrie ainsi que le seront
Les feuilles de ce bois aux approches d’automne.
La jeunesse et l’amour ont la même couronne,
Puis-je encor la poser sur mes tempes d’hiver ?

— Eh, qu’importe ! En mon cœur, aujourd’hui comme hier,
Tu es et resteras aussi jeune, aussi belle,
Gardant le même ciel au fond de ta prunelle,
Dis, le veux-tu ?
Dis, le veux-tu ? — Non, Pierre, je ne puis ! Vois-tu.
Cette affreuse minute où tu as revêtu
De ton mépris cinglant mon pauvre amour fidèle
Entre nous surgira comme une ombre mortelle.
Pour toi, j’aurais voulu t’apporter blanc et pur
Le voile de l’épouse, être comme l’azur
Sans nuage, ou la neige au réveil de l’aurore.
Et maintenant, dis-moi, Pierre, le suis-je encore !

124