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Page:Masoin - Nadine, 1914.djvu/20

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La nuit était profonde et les routes obscures.
Ils marchaient à travers d’épaisses sépultures
où le vent s’engouffrait en poussant ses clameurs,
Et des torrents de pluie augmentaient les rumeurs
Qui secouaient les bois jusque dans leurs racines.

— Avez-vous peur, dit Pierre en regardant Nadine ?
Donnez-moi votre bras ; à peine si je vois
Les arbres du chemin, on n’entend pas sa voix
Parmi tout ce fracas. Vous devez être lasse
De marcher dans le vent et de suivre ma trace !

Se serrant l’un à l’autre ils pressèrent le pas
Tandis que la forêt croulait avec fracas.
Ils prirent le sentier qui longeait la rivière
Dont les flots écumants se brisaient sur les pierres.
Ils ne disaient plus rien. Pourquoi parler d’ailleurs,
Les voix étaient dans l’ombre et chantaient dans leur cœur ?
Le vent semblait moins fort puisqu’ils luttaient ensemble.

— On marche mieux ainsi, dit Pierre, et il me semble
Que j’irais dans la nuit jusqu’au prochain matin.

— Et moi je vous suivrais, toujours, toujours plus loin !
Lui dit la jeune fille.
_____________Ils se turent ensuite
Car les mots étaient pris par le vent dans sa fuite.
Enfin, une clarté scintilla devant eux
Comme un œil égaré dans le ciel ténébreux.



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