Page:Masoin - Nadine, 1914.djvu/59

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Il arriva bientôt au seuil de la chaumine.
À la porte il frappa, et la main de Nadine
Ouvrit. La jeune fille exprima par un cri
Sa surprise en voyant de Pierre l’air meurtri.
Elle lui prit la main.
Elle lui prit la main.— Qu’avez-vous, lui dit-elle,
Vous êtes comme un mort ?
Vous êtes comme un mort ? — C’est que l’heure est cruelle
Dit Pierre, mon aimée, il faut nous séparer !
J’ai parlé à mon père, et j’avais espéré…
Mais non, il m’a chassé ! Je pars gagner ma vie.

— Chassé ! cria Nadine, il faut donc qu’on expie
Le crime d’avoir cru au bonheur en s’aimant ?
Chassé ! c’est impossible ! Et c’est pour moi, vraiment,
Que vous partez ? Non ! non ! J’irai chez votre père,
Le prier à genoux ; je noierai sa colère
Dans le flot de mes pleurs ; je lui dirai des mots,
Des mots tristes et doux qui seront des sanglots,
Et il s’attendrira.
Et il s’attendrira.— Inutile, dit Pierre,
Car son cœur est de fer et sa tête est de pierre.

— Mais j’irai lui crier que cela n’est pas vrai,
Que vous ne m’aimez pas, je dirai que jamais
Vous ne m’avez aimée et que jamais mon âme
Ne te tendit les bras ! Oh ! mentir c’est infâme !
Mais toi ! souffrir pour moi ! le pourrai-je endurer ?



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