Page:Masoin - Nadine, 1914.djvu/60

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— Eh ! qu’importe, dit Pierre, à mon cœur de pleurer,
D’être une coupe amère aux fleurs rouges de lie
Si tes bras à mon cou comme un lierre se lient !
J’ai des mains pour l’ouvrage et mon cœur pour t’aimer.
Bientôt je reviendrai. Que puis-je redouter
Si tu restes ici à m’attendre fidèle ?

— Je veux l’être, dit-elle, autant que ma prunelle
Gardera ton image avec ton souvenir !

— Alors, c’est du soleil qui dore l’avenir !
Je m’en vais sans regret, et quand les hirondelles
Au bord de nos vieux toits abriteront leurs ailes,
Je reviendrai aussi et nous nous marierons,
Et sur notre bonheur les cloches chanteront…
Mais l’heure des adieux tinte dans le ciel blême.

— Pas encor, dit Nadine. Avant l’instant suprême,
Je veux t’accompagner jusqu’au sommet, là-bas
où commence le bois.

où commence le bois.Ils unirent leurs pas
Lentement, désirant prolonger l’heure brève
Qui glissait tristement comme ce qui s’achève.
Le ciel était noyé de détresse comme eux
Et la neige couvrant les espaces laiteux
Reposait immobile, infinie et altière
Comme un parvis de marbre au seuil d’un cimetière.



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