Page:Masoin - Nadine, 1914.djvu/68

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Comme des trous saignants sur le front des forêts
Que de légers brouillards de duvets entouraient.
Sur le toit de l’église aux humides tourelles
Se répondait plaintif le cri des hirondelles,
Et les voyant partir Nadine se disait :
C’est l’hiver qui approche et la mort, son valet,
Enterrera la joie et les feuilles dernières.
C’est tristesse et douleur pour les pauvres chaumières
Et pour mon cœur ! Quand donc reviendra-t-il, l’aimé,
Qui fait de mes hivers un printemps parfumé ?



Avec impatience elle attendait les lettres
Qu’un messager de Pierre avait à lui remettre.
C’était le Sécheret, un marchand ambulant,
Qui sur tous les chemins promenait à pas lents
Son commerce traîné dans un char misérable.
Un mulet efflanqué et d’aspect lamentable
Conduisait, tête basse, à pas laborieux
Le chariot disloqué branlant sur ses essieux.
On allait cahotant de village en village ;
Sécheret exhibait ses produits de tout âge
Aux paysans curieux. Il amassait des sous
Qu’il dépensait à boire en lampant à grands coups.
Alors, on pouvait voir sur la route poudreuse
Zigzaguer l’attelage aux pentes sinueuses.
Il pleuvait du gourdin sur le dos du mulet
Qui crevait sous les coups. Enfin, le Sécheret



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