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avant-propos

Mettons qu’elle ait raison, la critique. De mon côté, je n’ai rien de Pygmalion et, sans autrement chicaner, me borne à répondre : affaire de goût. La chose est arrivée qu’un auteur croyant égayer le public a vu sa pièce égayée de sifflets.

Il y a une chose qui ne souffle pas de doute, c’est que lorsqu’on a trimé toute la sainte journée, creusé l’échinant problème du pain quotidien, potassé Planiol ou Dieulafoy, on ne songe guère, le soir venu, à ouvrir un auteur sérieux, on va plutôt à la comédie, on cherche à la radio un programme bouffe, on reluque dans sa bibliothèque un auteur gai.

Les esprits chagrins pourront dire que je me suis abaissé jusqu’à la gaudriole ou au burlesque : j’estime que je me suis élevé si je mets un peu de gaieté et de sérénité dans l’âme du lecteur. En d’autres termes, si À vau-le-nordet arrive à votre heure de lassitude, ce sera mon heur.

C’est Beyle, l’illustre Beyle, qui a dit qu’« un peu de folie ne gâte rien ». Le grand psychologue avait une façon bien réconfortante d’envisager la vie. Rien de moutonnier chez lui, et il serait bien osé celui qui prétendrait que Beyle ment.

À d’autres donc, à d’autres plus savants le soin de toujours penser sans rire. Pour le quart d’heure, rions sans penser ou pinçons sans rire.

Il est certes bien commode pour l’humanité que de fortes têtes pâlissent sur de gros in-folio tâchant