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MES SOUVENIRS

Je n’avais pas quitté Paris sans en emporter de vives angoisses au sujet de la distribution de l’ouvrage. Je voulais, pour incarner Chimène, la sublime Mme Fidès Devriès, mais l’on disait que, depuis son mariage, elle ne désirait plus paraître au théâtre. Je tenais aussi à mes amis Jean et Édouard de Reszké, arrivés spécialement à Paris pour causer du Cid. Ils connaissaient mes intentions à leur égard. Que de fois ai-je monté l’escalier de l’hôtel Scribe, où ils habitaient !…

Enfin les contrats furent signés, et, finalement, la lecture eut lieu, comme l’Opéra me le demandait.

Puisque je vous ai parlé du ballet du Cid, il me revient en mémoire que c’est en Espagne que j’ai entendu le motif devenu le début de ce ballet.

J’étais donc dans la patrie même du Cid, habitant une assez modeste posada. Le hasard voulut qu’on y fêtât un mariage, ce qui donna motif à des danses qui durèrent tout la nuit, dans la salle basse de l’hôtel. Plusieurs guitares et deux flûtes répétaient à satiété un air de danse. Je le notai. Il devint le motif dont je parle. C’était une couleur locale à saisir. Je ne la laissai pas échapper.

Je destinais ce ballet à Mlle Rosita Mauri, qui faisait déjà les beaux soirs de la danse à l’Opéra. Je dus même à la célèbre ballerine plusieurs rythmes très intéressants.

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De tout temps, les liens d’une vive et cordiale sympathie ont uni le pays des Magyars à la France.

L’invitation que des étudiants hongrois nous firent un jour, à une quarantaine de Français, dont j’étais,