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MES SOUVENIRS

duisit ma voix jusqu’à celle de Perséphone, je veux dire… de Thérèse, à laquelle je faisais entendre telle ou telle terminaison vocale, voulant avoir son opinion, avant de l’écrire.

Par une belle journée de printemps, j’étais allé revoir le parc de Bagatelle, et ce joli pavillon, alors encore abandonné, construit sous Louis XVI par le comte d’Artois. Je fixai bien dans ma mémoire ce délicieux petit château que la Révolution triomphante avait laissé devenir une entreprise de fêtes champêtres, après en avoir spolié son ancien propriétaire. En rentrant en sa possession, sous la Restauration, le comte d’Artois l’avait appelé « Babiole ». « Bagatelle » ou « Babiole », c’est tout un, et ce même pavillon devait, presque de nos jours, être habité par Richard Wallace, le célèbre millionnaire, philanthrope et collectionneur.

Je voulus, plus tard, que le décor du premier acte de Thérèse le rappelât exactement. Notre artiste fut particulièrement sensible à cette pensée. On sait, en effet, la parenté qui l’unit à la descendance des marquis d’Hertford.

La partition une fois terminée et connaissant les intentions de Raoul Gunsbourg, qui avait désiré cet ouvrage pour l’Opéra de Monte-Carlo, nous fûmes informés, Mme Massenet et moi, que S. A. S. le prince de Monaco honorerait de sa présence notre modeste demeure et viendrait déjeuner chez nous avec le chef de sa maison, M. le comte de Lamotte d’Allogny. Immédiatement, nous invitâmes mon cher collaborateur et Mme Claretie, ainsi que mon excellent éditeur et ami et Mme Heugel.