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Page:Massenet - Mes souvenirs, 1912.djvu/75

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MES SOUVENIRS
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Nous passâmes devant Montereau. Montereau ! presque Paris, à l’horizon ! Pouvais-je me douter alors que je posséderais une demeure d’été, bien des années plus tard, dans ce pays, voisin d’Égreville ?

Quel contraste entre le beau ciel de l’Italie, ce ciel toujours bleu, tant chanté par les poètes, et que je venais de quitter, — et celui que je retrouvais sombre et gris, si maussade !

Mon voyage et quelques menus frais payés, il me restait en poche la somme de… deux francs !



Quand j’arrivai chez ma sœur, quelle joie pour moi ! Quelle aubaine aussi !

Au dehors il pleuvait à torrents, et les précieux deux francs me servirent à acheter ce vade mecum indispensable : un parapluie ! Je ne m’en étais point servi pendant tout mon séjour en Italie.

Abrité ainsi contre le mauvais temps, j’allai au ministère des Finances, où je savais devoir trouver mon premier trimestre de la nouvelle année. À cette époque les grands-prix jouissaient d’une pension de trois mille francs par an. J’y avais droit encore pendant trois ans. Quelle fortune !

L’ami si bon dont j’ai déjà parlé, prévenu de mon retour, m’avait loué une chambre au cinquième étage du no 14 de la rue Taitbout.

De la beauté calme et sereine de ma chambre à l’Académie, je retombais au centre de ce Paris agité et bruyant.