Page:Massillon - Sermons et morceaux choisis, 1848.djvu/635

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Ces grands objets passent devant nos yeux comme des scènes fabuleuses : le cœur se prête pour un moment au spectacle ; l’attendrissement finit avec la représentation, et il semble que Dieu n’opère ici-bas tant de révolutions que pour se jouer dans l’univers, et nous amuser plutôt que nous instruire.

Ajoutons donc les paroles de la foi à cette triste cérémonie, qui sans cela nous prêcherait en vain : racontons, non les merveilles d’un règne que les hommes ont déjà tant exalté, mais les merveilles de Dieu sur le roi qui nous est ôté. Rappelons ici ses vertus plutôt que ses victoires ; montrons-le plus grand encore au lit de la mort qu’il ne l’était autrefois sur son trône, dans les jours de sa gloire. N’ôtons les louanges à la vanité que pour les rendre à la grâce. Et quoiqu’il ait été grand et par l’éclat inouï de son règne, et par les sentiments héroïques de sa piété, deux réflexions sur lesquelles va rouler ce devoir de religion que nous rendons à la mémoire de très-haut, très-puissant, et très-excellent prince Louis XIV du nom, roi de France et de Navarre, ne parlons de la gloire et de la grandeur de son règne que pour en montrer les écueils et le néant qu’il a connus ; et de sa piété, que pour en proposer et immortaliser les exemples.

Louis se trouva seul, jeune, paisible, absolu, puissant, à la tête d’une nation belliqueuse, maître du cœur de ses sujets et du plus florissant royaume du monde, avide de gloire, environné des vieux chefs, dont les exploits passés semblaient lui reprocher le repos où il les laissait encore.

Qu’il est difficile, quand on peut tout, de se défier qu’on peut aussi trop entreprendre !

Les succès justifient bientôt nos entreprises. La Flandre est d’abord revendiquée comme le patrimoine de Thérèse ; et tandis que les manifestes éclaircissent notre droit, nos victoires le décident.

La Hollande, ce boulevard que nous avions élevé nous-mêmes contre l’Espagne, tombe sous nos coups : ces villes, devant lesquelles l’intrépidité espagnole avait tant de fois échoué, n’ont plus de murs à l’épreuve de la bravoure française, et Louis est sur le point de renverser en une campagne l’ouvrage lent et pénible de la valeur et de la politique d’un siècle entier.

Déjà le feu de la guerre s’allume dans toute l’Europe : le nom-