Page:Massillon - Sermons et morceaux choisis, 1848.djvu/644

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autres hommes : un ami fidèle ; un époux, malgré les faiblesses qui partagèrent son cœur, toujours respectueux pour la vertu de Thérèse ; condamnant, pour ainsi dire, par ses égards pour elle, l’injustice de ses engagements, et renouant par l’estime un lien affaibli par les passions ; un père tendre, plus grand dans cette histoire domestique, qui ne passera peut-être point à nos neveux, que dans les événements éclatants de son règne, que les histoires publiques conserveront à la postérité.

Louis porta en naissant un fonds de religion et de crainte de Dieu, que les égarements même de l’âge ne purent jamais effacer. Le sang de saint Louis et de tant de rois chrétiens qui coulait dans ses veines ; le souvenir encore tout récent d’un père juste ; les exemples d’une mère pieuse ; les instructions du prélat irrépréhensible qui présidait à son éducation ; d’heureuses inclinations, encore plus sûres que les instructions et les exemples : tout paraissait le destiner à la vertu comme au trône.

Mais, hélas ! qu’est-ce que la jeunesse des rois ? une saison périlleuse, où les passions commencent à jouir de la même autorité que le souverain, et à monter avec lui sur le trône. Et que pouvait attendre Louis, surtout dans ce premier âge ? L’homme le mieux fait de sa cour, tout brillant d’agréments et de gloire ; maître de tout vouloir, et ne voulant rien en vain ; voyant naître tous les jours sous ses pas des plaisirs nouveaux qui attendaient à peine ses désirs ; ne rencontrant autour de lui que des regards toujours trop instruits à plaire, et qui paraissaient tous réunis et conjurés pour plaire à lui seul ; environné d’apologistes des passions, qui soufflaient encore le feu de la volupté, et qui cherchaient à effacer ses premières impressions de vertu, en donnant des titres d’honneur à la licence ; au milieu d’une cour polie, où la mollesse et le plaisir ont trouvé de tout temps le secret de s’allier, et même d’aller de pair avec la valeur et le courage ; et enfin, dans un siècle où le sexe, peu content d’oublier sa propre pudeur, semble même défier ce qui peut en rester encore dans ceux à qui il veut plaire.

Et cependant, de l’exemple du prince, quel déluge de maux dans le peuple ! Ses mœurs forment bientôt les mœurs publiques : l’imitation, toujours sûre de plaire et d’attirer des grâces, réconcilie l’ambition avec la volupté : les plaisirs, d’ordinaire gênés par