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NAPOLÉON À SAINTE-HÉLÈNE

du levier et un de ses officiers à l’autre. Il se donnait ainsi quelque mouvement. « Souvent, dit Arthur Bertrand, il faisait placer ma sœur et deux de mes frères ou moi à l’autre extrémité de la bascule et s’amusait à nous donner de fortes secousses qui parfois nous jetaient à bas. C’était en même temps de l’exercice et une petite distraction à ses peines. « Le mois de février passa ainsi. Sans qu’on parût y porter une grande attention, les vomissements devenaient fréquents, presque quotidiens. La fatigue augmentait, l’alimentation était presque nulle ; toutefois, de temps à autre, lorsque le vent était tombé et que le soleil paraissait, il faisait encore un tour en calèche, au pas.

Le 17 mars, au matin, il avait reçu l’abbé Buonavita auquel les médecins avaient ordonné de retourner en Europe et qui allait s’embarquer. Il était au lit ; l’abbé, qui marchait avec une peine extrême, s’approcha, mit un genou en terre pour baiser la main que lui tendait l’Empereur ; celui-ci l’invita à se relever et à s’asseoir. Il lui donna ses instructions sur ce qu’il aurait à dire à Madame et à la Famille. L’abbé, qui ne l’avait pas vu depuis plusieurs semaines, sortit consterné du ravage que la maladie avait exercé sur ses traits et en même temps profondément ému de son calme et de sa résignation. Un peu plus tard, Montholon, suivant l’ordre qu’il avait reçu de l’Empereur de lui faire même violence pour le décider à sortir, vint, selon