couvertes. Toutefois nul ne conteste ni la puissance de sa raison, ni la pureté de ses tendances. Un certain mélange de force et de faiblesse, j’allais dire d’audace et d’insuffisance, fait à la fois l’imperfection de sa doctrine et la gloire de sa vie. Car nul n’a jamais, avec des études moins fortes et moins étendues, abordé les problèmes avec plus d’énergie et offert des solutions avec plus de bonne foi ; j’ajouterai même d’autorité, puisque la bonne foi en donne une si grande.
Son point de départ en philosophie doit être bien marqué. Rien de plus instructif. Il se défie de la philosophie. On dirait une impression d’enfant plutôt que de jeune homme. Il avait sept ans quand Palissot fit représenter sa comédie des Philosophes, et l’on se demande si la pensée de cette triste et violente incrimination, pensée très-goûtée alors dans un certain monde, ne serait point parvenue à dominer la sienne par une influence quelconque. Il parle des grands hommes auxquels nous songeons toujours quand il s’agit de son temps avec une admiration très-sincère, et il désirait vivement connaître Voltaire, Rousseau surtout ; mais, en général, les doctrines des écrivains que le dix-huitième siècle qualifiait de philosophes l’irritent ou lui inspirent le dédain. Il estimait même fort peu ces sciences si positives, et d’ordinaire si exactes en vertu de leurs méthodes, que les esprits les plus sévères pour la philosophie spéculative exceptent de leurs censures. C’était l’effet d’un spiritualisme outré. Il ne comprend pas, dit-il, que les hommes qui connaissent les douceurs de la raison et de l’esprit puissent s’occuper un instant de la matière.