Page:Matter - Saint-Martin, le Philosophe inconnu, 1862.djvu/31

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tels que les donne la Sophia Pistis, qu’on a souvent attribuée au gnostique Valentin, mais il leur donnait certainement beaucoup plus d’étendue.

Je crois pouvoir dire qu’à mon avis Martinez n’ajoutait rien à son enseignement en achevant son ouvrage et qu’il perdait peut-être plusieurs de ses adeptes.

En effet, son auditeur chrétien pouvait écouter avec plus ou moins de curiosité les harangues que Martinez y prête à Adam, à Noé, à Moïse, ou à la pythonisse d’Endor ; mais il n’aurait pas accepté de même des discours prêtés à Jésus-Christ, à saint Jean ou à saint Paul. On donnerait sous des noms aussi vénérés des discours supérieurs ou égaux, si cela n’était pas impossible, à leurs paroles authentiques, qu’on ne satisferait pas les délicates et sévères exigences de la pensée chrétienne. Or ceux que Martinez prête avec tant de laisser aller aux personnages qu’il nous présente sont très-faibles, sans portée. Ils témoignent, de la part d’un homme de race orientale, une absence étonnante de goût et de sentiment en matière de style majestueux. De l’éloquence hardie, impétueuse et sublime, des textes mosaïques, il ne reste pas trace dans les dissertations, tantôt abstraites, tantôt familières qu’il nous offre. Que le langage d’un juif portugais, même converti, ne soit pas très-français, cela se comprend, et loin de choquer ses auditeurs, cela pouvait ajouter au prestige dont il savait les fasciner. Mais que de jeunes militaires du dernier siècle, appartenant aux bonnes familles du pays et ayant au milieu d’eux un spirituel magistrat qui s’était familiarisé dès le collège avec les philosophes du jour, aient accepté cet enseignement comme raisonnable,