Page:Matter - Saint-Martin, le Philosophe inconnu, 1862.djvu/38

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« qu’il fallait s’en contenter. » Avouer qu’on n’a que des formules théurgiques, serait faire un singulier aveu. Et, en réalité, c’en est un tout autre que fait dom Martinez. Saint-Martin n’aurait pas dû s’y tromper, et il vaut la peine de tirer la matière au clair, afin d’arriver à des idées précises, non pas seulement sur Martinez et sur Saint-Martin, mais sur toute cette théurgie contemporaine de Rousseau et de Voltaire. Car le récit de Saint-Martin a cette portée, et il y a ici une profession de foi curieuse à recueillir des lèvres d’un des grands admirateurs de Rousseau, se confessant à un ancien correspondant du philosophe de Genève.

« Je crois, dit Saint-Martin à son ami de Berne, je crois comme vous que la sagesse divine se sert d’Agents et de Vertus pour faire entendre son Verbe dans notre intérieur. » (Lettre du 12 juillet 1792.)

Telle est donc sa doctrine vingt-cinq ans après son initiation à l’école de Martinez.

Il a fait de grands pas dans l’intervalle, et sa pensée sur le système de son maître a beaucoup changé. Sa pratique aussi s’est profondément modifiée ; elle s’est attachée plus au centre, à l’intérieur, moins à la circonférence, à l’extérieur, comme il se plaît à nous l’apprendre. Et cependant il croit que, pour faire la chose principale dans cet intérieur, pour y faire entendre le Verbe, la sagesse divine se sert d’Agents et de Vertus.

Or, ces Agents et ces Vertus, ce ne sont, selon Saint-Martin, ni nos idées, ni des idées quelconques ; ce ne sont ni nos sentiments, ni des sentiments quelconques. A cet égard il n’est pas de doute possible. Ce sont des puissances intermédiaires entre Dieu et l’homme ; Liebis-