Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/139

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diriger là où il est le plus faible, cherchant les eaux mortes, distinguant les remous, bref… — ça va mieux !

Les bagages recouverts d’une bâche, le hamac monté, je fais cuire du riz — Il pleut.

Un peu moins cafardeux, ce soir… seulement une hâte fébrile d’être aux Tumuc Humac. Ce prologue m’énerve et il est cependant nécessaire comme apprentissage et préparation à la jonction Oyapock-Maroni par Tumuc Humac.

Il est presque nuit. J’étais couché dans le hamac lorsque j’entends des voix. Deux canots montés par des Boschs et une vieille femme créole sont au pied du saut. À les voir je ressens une joie inexprimable, comme si j’étais retiré du ·monde depuis dix ans. Eux, évidemment indifférents, quoiqu’étonnés de me voir seul ; ils me prennent pour un vieux blanc, c’est-à-dire un forçat à la recherche de l’or et, lorsque je leur explique que je suis seul mais pas forçat, ils cherchent mes piroguiers.

Je suis secrètement heureux de les voir franchir le saut Vitallo avec difficulté et même d’être en danger de couler au passage du second canot. Ils sont six hommes à forcer sur le « takari » et j’étais seul ! Ils partent aussitôt. Leurs canots sont chargés de vivres à destination des mineurs de Vitallo récemment arrivés. Je les verrai demain.

Me voici seul à nouveau. Il pleut. Comme tous les soirs, pour ne pas changer, un peu dedans, un peu de hors, le caoutchouc de la bâche se craquelle et, par les fissures, l’eau dégouline doucement. Je rêve de choses oubliées et au réveil suis étonné de me retrouver au saut Vitallo.