Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/186

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Suivant la piste, je suis allé à la chasse. On entend des vols lourds, on se précipite, on guette… on ne voit rien ! car le sous-bois est trop dense. Au retour, sans m’en apercevoir, je retrouve la piste empruntée le matin et qui fait une bande suivant le criquot au bord duquel je campe pour repartir ensuite S.E. Je me demande quelle est la raison de ce circuit. En tous cas, j’y ai perdu deux heures !

Demain matin, j’irai chercher le sac G.I. (ou américain) que je laisserai ici pour repartir plus loin installer le camp n° 3 — celui-ci étant le camp « Pinot… »

Ce n’est pas la forêt qui cerne le camp ce soir, c’est un filet de lianes gigantesques et enchevêtrées s’aggripant à la pourriture vaseuse du sol, aux racines tourmentées mises à nu par les eaux qui creusent des canaux où s’écoulent les eaux de pluie. Pinots, épineux à profusion, de ci de là un grand arbre mort dont le tronc blanc est chargé de lianes. Peu de gibier, même pas du tout. On entend à peine quelques petits oiseaux. J’abats un arbre mort et moussu pour allumer un feu, je le débite en quartiers puis, avec les copeaux et un bout d’encens fais le foyer, de chaque côté, parallèlement, deux bûches de bois vert entaillées par leur milieu. Ça prend doucement, mais ça prend et mon feu estompe le cafard qu’amène la nuit.

Boby a, ce soir, mangé du pinot avec moi. Pauvre chien ! il a le ventre creux et les côtes saillantes, la rivière ni la forêt ne l’engraissent et il me regarde en se léchant les babines pour exprimer sa faim. Même pas un petit oiseau à lui donner à manger, rien, la forêt est sinistrement vide. Peut-être demain aurai-je plus de chance ?