Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/189

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feu en vitesse, fais rôtir une cuisse du hocco, la dévore incontinent, puis l’autre, puis une aile, puis la deuxième… Je ne peux plus m’arrêter. Si, tout de même, car il faut penser à ce soir. Boby a eu sa part et est tout ragaillardi.

Alors, retirant le foie, la tête, le cou que je mets à bouillir pour faire la soupe, j’installe la carcasse sur un boucan et, jusqu’à la nuit m’affaire à surveiller ma cuisine. Enfin je repose, repu mais toujours las et accablé par une paresse invincible. Je dois retourner au camp n° 3 chercher le sac à dos et le hamac — 2 kilomètres de marécages aller, autant retour. Oh ! Dieu quelle flemme !

Enfin debout, en route ; on est bien pourtant, à l’étape, à reposer sans penser à rien.

Je suis allé chercher le sac, je suis revenu, j’ai mangé la soupe.

Malgré notre faim, Bohy et moi n’arrivons pas à bout du reste car le « hocco », du volume d’une grosse dinde aurait satisfait six personnes au moins. En le dépeçant tant bien que mal au sabre d’abatis, j’ai pensé aux repas du Dimanche lorsque j’étais gosse, chez ma marraine, à la campagne. Il y avait là, en général, toute la famille. On tuait une poule et chacun avait son morceau préféré. Chaque morceau du hocco me rappelait quelqu’un de cher, mort ou vivant, et nos soirées intimes à écouter la radio cependant que les châtaignes rôtissaient sur la cuisinière.

Ce soir, j’ai tendu le hamac sous le carbet. Le boucan fume. Je l’ai couvert de palmes de pinot car il pleut et la pluie ruisselle, traversant le toit fragile.