Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/200

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peut-être cet après-midi, c’est la moyenne maxima que je puis me permettre.

Je commence à sentir des crampes d’estomac. Ce n’est que le commencement : 5e jour du raid. 1e jour : 2 km., 2e jour : 1 km., 3e jour : 1 km., 4e jour : repos. 5e jour : 2 km. sans doute. Quelle avance de tortue. Voici les marécages, il s n’en finissent plus ; quel fouillis ! les herbes coupantes me lacèrent les jambes… comme si, dans mon état, j’avais besoin d’une saignée ! L’air est lourd, on n’entend même pas un chant d’oiseau. Deux fois des arbres tombés gigantesques barrent la piste ; je taille au sabre pour la retrouver de l’autre côté, m’enlisant jusqu’aux genoux dans les détritus végétaux tout pleins de bulles et d’insectes.

Au retour, alors que j’allais chercher le sac G.I., je tombe dans l’eau du criquot cernant le camp n ° 3 et ma lassitude est telle que anéanti, incapable de me relever je demeure quelques instants baignant dans l’eau fangeuse. Tout, évidemment, est trempé, le sel est fondu, car les boîtes de fer mal ajustées ont laissé pénétrer l’eau. Le linge de rechange trempé pèse terriblement ; le savon, puis finalement le sac, bref, j’abandonne tout cela, casant le reste, c’est-à-dire les munitions, dans la musette. Ayant sauvé une petite boîte de sel que je conserve à titre de médicament, ma foi, tant pis pour la nourriture ! La journée s’avance, je suis toujours à me dépétrer dans les marécages. À chaque halte j’écris : c’est tellement réconfortant ! La faim se faisant sentir avec une insistance déplacée, j’abats un « pinot » et le consomme sur place. Ça se calme un peu mais pour combien de temps ?

Et la série des marécages continue ; bien souvent, ils sont presque secs, mais toujours très encombrés.