Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/215

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prenions nos repas ensemble. — La salle à manger tellement briquée amoureusement par maman désolée de m’y voir éparpiller la cendre de cigarette ou la poussière de mes chaussures. À chacun de mes retours à la maison, c’était le même lustre, le même accueil, la même tendresse voilée de mélancolie à la pensée du nouveau départ, proche déjà :

— Maman, j’ai faim !

— Patience, ça mijotte, mon petit !

Ah ! la bonne soupe, les bons petits plats…

Le soir, je sortais parfois et, rentrant tard, je trouvais un plateau tout près, bien couvert, tiède.

— Si tu as faim en arrivant… disait maman prévoyante.

Je songe à leur amour, je songe à eux deux, ne pouvant les dissocier l’un de l’autre et soudain, quelle folle envie m’étreint de pouvoir les embrasser, leur dire :

— Bonne nuit, à demain…

Demain ! veille de Noël… Pour moi : quelques kilomètres de plus.

Ah ! l’envie de les revoir est telle que je suis avec eux et la forêt n’existe plus, plus rien n’existe, je suis à la maison.

Comme l’on sait chérir lorsqu’on est loin et comme l’on sait apprécier la quiète tendresse du foyer. Je ne peux pas me défendre de ces rêves, ce sont des rêves d’homme et puis, je sais que, malgré eux, je suivrai la voie que je me suis tracée. Je songe combien ils seraient fiers de me voir revenir avec la réussite, je songe à la vie nouvelle que je pourrais alors leur donner, et tout cela me donne le courage d’affronter la nuit. Leur amour me soutient autant que ma foi et souvent je relis leurs lettres, ma seule lecture, lettres d’une maman,