Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/216

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simple et émouvante, celles d’un papa, chargées de conseils, de sagesse, d’affection bourrue pour mieux cacher sa peine d’homme…

J’écoutais les bruits de la forêt, tout à l’heure. Soudain, un froissement léger m’annonce l’arrivée d’une bande de singes. Je les vois, minuscules, allant d’une branche à l’autre… Ils sont gros comme de petits chats mais, mieux vaut tenir qu’attendre et ça ferait toujours une bonne soupe ! Je tire, double ; heureux hasard, en voici un qui dégringole, reste suspendu un instant, puis s’écroule à mes pieds. C’est un « ouistiti mains dorées ». J’ai un peu de peine sur le moment d’avoir tué une aussi jolie petite bête et puis, je songe aux jours passés, à la faim des jours à venir et, sans plus de regrets, je le dépèce pour le joindre aux quartiers de hocco sur le boucan.

Décidément, ce camp est celui de la ripaille ! Je venais à peine de terminer mes préparatifs lorsqu’une rumeur coutumière annonçant la pluie passe en rafale sur les cimes — la foule immense scandant son mot d’ordre — le crépitement de fusillade de la première ondée et puis les feuilles soudain vernissées qui luisent aux dernières lueurs du jour.

Je suis bien dans mon hamac à voir la pluie tomber ; encore un peu de mélancolie peut-être, mais je goûte le charme de cette soirée en brousse. Et puis, mon hamac, c’est mon chez moi ! Les murs sont transparents et le plafond fragile, mais au travers de la moustiquaire je vois la forêt ; je m’y suis installé de mon mieux tabac, allumettes, carnets de notes, bougie dans une minuscule calebasse. — Tout ceci sur les bords pendants de la moustiquaire, qui se tend sous le poids. Je tire la fermeture éclair, j’installe sous ma tête la cou-