Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/238

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À la nuit j’ai tué deux petits oiseaux gros comme des moineaux, maigre repas qui me laisse sur les dents ; je les ai à peine plumés et passés à la braise. Côtes, tripes, os et becs, tout y a passé. Je me demande combien de temps on peut tenir à ce régime. Je crois bien avoir l’occasion unique d’en faire l’expérience. Tenir, ma foi, on tient, mais faire un effort !… Par exemple, vais-je pouvoir construire ma pirogue ? car c’est la dernière solution ! Abattre l’arbre, le creuser, lui donner la forme…

Cette nuit, je n’ai pas pu dormir pensant à mon étourderie. Il était à prévoir qu’un radeau ne pourrait jamais aller bien loin sur une petite crique comme celle-ci. Il faut une embarcation étroite et légère, capable de se faufiler partout.

Je n’ai pas su le prévoir. Mea culpa ! Ce voyage m’instruit énormément et c’est au fond la préparation vraiment indispensable aux Tumuc Humac que j’affronterai ainsi, fort de mon expérience et aguerri en toutes choses.

Décidément, Brésil et Guyane, quoique voisins, ne présentent pas les mêmes aspects et mes expéditions au Matto Grosso ne m’ont donné qu’une expérience toute relative de la vie du grand bois. À chaque pays ses caractéristiques, il est bien vrai et, dans chacun, l’homme doit faire un apprentissage.

J’ai pensé partir à pied, mais l’état de mes chevilles enflées m’interdit d’y songer plus longtemps et puis, j’ai décidé d’achever la jonction par le Tamouri et le Camopi et bien, je l’achèverai ainsi et pas autrement.

Mais à tout prix je dois manger, il ne faut pas me laisser mourir de faim. Il faut manger ; pas de secours à espérer, ni de manne du ciel. Je suis seul, à moi de