Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/239

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me débrouiller et je vais me débrouiller. Je tuerai, je mangerai, car je veux vivre, revoir ceux qui me sont chers, revoir la foule, la ville, la maison ; vivre enfin et pas achever ma carrière sur les bords du Tamouri comme un incapable ou un infirme.

Oh ! mon Dieu, donnez-moi des forces, du courage. Maman, si tu savais comme penser à toi me donne une raison de persévérer et d’espérer… à vous deux, mes parents chéris, car je vous ai promis de revenir, je reviendrai.

Un instant, j’ai pensé que j’allais mourir de la manière la plus atroce qui soit, mourir de faim ; mais mon subconscient veille et je sais que je m’en sortirai, que cette aventure prendra fin mais demeurera à jamais la plus belle que j’aie vécue jusqu’à maintenant.

Le tonnerre gronde avec force, il souffle un vent d’orage et, lorsque les nuages chassés par lui découvrent la lune quelques instants, je vois, se découpant sur le ciel noir, les silhouettes livides des arbres canons qui oscillent follement dans tous les sens et, de mon hamac, ça me donne le vertige ; alors, je ferme les yeux et j’essaie de dormir, mais sans pouvoir y arriver.

Malgré le feu, j’ai froid ; je suis couvert cependant. Est-ce un signe de faiblesse ? Pas de fièvre pourtant car, grâce à Dieu, à part la dysenterie du Tamouri et quelques accès de palud larvé, je suis en bonne santé.

La pluie tombe. La nuit est profonde ; nous sommes maintenant en pleine saison des pluies. Mauvais pour la chasse !… quant à la crique, les eaux vont monter.

Ah ! si je pouvais manger, qu’importerait la pluie, mes chevilles et jusqu’au côté droit contusionné qui se