Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/241

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peux, comme les Indiens, courir sans grimaces les buissons épineux.

Trois heures du matin… le froid m’éveille comme d’habitude et il m’est absolument impossible de me rendormir. Je ranime les braises, je, fume, j’allume la bougie, j’écris… J’attends le jour avec une impatience fébrile car c’est maintenant que l’on songe à des tas de choses qui vous amolissent.

Ah ! un bon café, un bonjour, une caresse… Rester ainsi me fait songer que jamais je ne reverrai tout cela et les idées noires arrivent en foule.

Alors, j’essaie de penser à l’arbre qu’il va falloir tout de même abattre, creuser, tailler avec ma malheureuse hachette. Là encore : « mea culpa » pour n’avoir pas pensé à emporter une hache. J’ai voulu économiser sur le poids. Je pare cette peur d’effort supplémentaire.

Je songe à la chasse, de tout à l’heure ; j’irai dans les marécages, de l’autre côté de la crique. Peut-être y trouverai-je quelque cochon se vautrant dans la boue ? un hocco et sa compagne se promenant ?

C’est un pécari qu’il me faudrait abattre, de manière à assurer mon ravitaillement pour une dizaine de jours et travailler au canot, en pleine forme et sans soucis. Je ne puis raisonnablement entreprendre à fond sa construction ; la recherche de ma nourriture accapare presque toute la journée et, arrivant de ces courses, je suis trop las pour me mettre au travail.

Malheureusement, avec la pluie, les bandes de pécaris se tiennent dans les hautes terres, bien loin des criques et je doute avoir la chance d’en rencontrer.

Le plus pénible est de marcher pieds nus. Ça m’effraie au départ… puis j’y songe ensuite quand ça fait mal