Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/248

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les pattes postérieures, plaçant le tout dans le hamac et fermant bien la moustiquaire car mouches et fourmis auraient tôt fait de festoyer sans l’abri de ce garde-manger improvisé.

Je m’assois alors près du feu et surveille la cuisson de la soupe, une cuillère à la main, un quart d’eau froide à portée. Si ça bout trop fort, je retire la casserole, tempère les braises et remets de l’eau froide faisant après le gros bouillon indispensable, mijoter à feu doux. Je goûte, j’attends… c’est cuit mais j’hésite avant de le retirer, ça pourrait être mieux cuit… Enfin, ne pouvant plus tenir, je me décide, je goûte encore… oh ! soupe exquise ; je couvre la casserole du plateau inférieur de la carapace et pars fumer une pipe dans le bois, car malgré ma fringale je ne veux pas encore manger… et cependant… je reviens au camp, je vire, je tourne, évitant de regarder la casserole, coupant du bois, écrivant, fumant, reprisant chemise ou short. Alors je n’en peux plus… À table !

Oh ! délice… hélas, c’est vite fini. Je racle le fond de la casserole où sont collés des morceaux de boudinet quand cela est fait, je m’assois, accoté au sac à dos, bourre une bonne pipe et la fume, buvant à petites gorgées le bouillon, le premier bouillon qui est le meilleur. Ma faim s’excite, car ceci, c’est l’entrée, la gourmandise. Tout à l’heure, on va passer au plus consistant. Nouvelle soupe avec les pattes de devant préalablement flambées. Le bouillon est moins riche mais n’en demeure pour autant qu’un régal exquis. Quelle saveur !… Aux pattes !… je n’y laisse que la corne des griffes et lorsque j’ai achevé de ronger les os (ceux que je ne puis mastiquer), les fourmis elles-mêmes, désespérées, ignorent ce que je leur abandonne… Nouvel arrêt — ma faim