Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/253

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Je le consomme aussitôt sans sucre, ni citron, ni vinaigrette et le trouve délicieusement sucré, mûr à point. Aussitôt, je me mets en quête de l’arbre qui le portait, mais sans succès, les cimes sont trop hautes et on ne voit rien. Alors je cherche sur l’humus… Pas plus de succès, mais de petites graines grignotées par les singes, de peu de saveur et acides. J’en fais ample provision et la recherche continue. Je suis en pleine forme.

Cette fois, ce sont des graines ayant le goût de cœur d’artichaut que je découvre. Nouvelle cueillette… On arrivera bien à calmer cet estomac ! Voici un hors-d’œuvre naturiste qui ne devra rien à personne.

Un vol lourd soudain m’arrête… Une perdrix. Dieu ! qu’elle est belle dans ses plumes mauves, avec son allure de pigeon. Elle est à dix mètres, se présentant de côté, me regardant de son œil rouge. Je vise soigneusement, je tire… Rien ! la balle ne part pas. Rageusement, je recharge. La perdrix s’est tournée et se présente de dos… Feu !… Des plumes volettent et elle s’envole… Je reste marri de ma maladresse, tellement furieux que je m’injurie à haute et intelligible voix, fonçant dans les broussailles à sa recherche, m’égratignant, me blessant, voulant à tout prix avoir cette perdrix dont je perçois encore le vol de temps en temps et de plus en plus loin. Puis je la perds. Coléreux, prêt à me battre, une sorte de folie furieuse s’empare de moi : je trépigne presque, injuriant la carabine, la perdrix, courant comme un possédé, tirant des colibris, des oiseaux plus petits que mes balles. Et puis enfin, las, l’accès passé, dominé, je me reprends et souris de cet emportement… Du sang-froid, garçon ! du sang-froid !

Mais je me suis endormi le ventre creux malgré mes