Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/255

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Sur la crique je trouve un crabe, je l’embroche : c’est toujours ça… et la chasse continue.

J’entends les oiseaux mais je sais trop bien qu’ils sont minuscules. Chaque jour je découvre de nouveaux chants. Aujourd’hui c’est celui-ci avec sa voix de klakson pour pétrolette 1900, et ce autre qui grince du bec pour se mettre à hurler comme une fillette fouettée à intervalle régulier. — Le charpentier au plastron couleur de sang, minuscule sur le tronc géant, donne des toc… toc sonores et puis encore celui-là avec sa voix de standardiste qui transmet à longueur de journée d’incompréhensibles messages, le hurlement de sirène de cet autre… Je fume, j’écoute, assis sur un tronc couché…

À mes pieds, se trouve la dentelle des bois qui, blanche comme la neige, ressemble aux cristaux que forme celle-ci lorsqu’elle glace sur les vitres d’un appartement, et tellement fragile que j’ose à peine la cueillir, craignant de la briser. Il y a aussi un champignon tout blanc, très droit, curieusement chapeauté de beige avec une ample résille délicate et blanche que le moindre souffle fait frissonner.

J’oublie ainsi ma faim, goûtant la joliesse de ces petites choses, seulement très ennuyé par un essaim de mouches dorées acharnées sur mes plaies et par les four mis qui défilent en cohorte, nettoyant leur passage et charriant chacune un gros morceau de feuille verte en guise de drapeau et, de loin, cette procession fait penser à une multitude de papillons verts. Chaque fourmi que l’on écrase a son odeur particulière. Certaines sont très agréables, rappelant des parfums connus et recherchés, d’autres le sont moins, empestant l’acide formique, écœurantes. Je note ainsi, luttant contre elles, con-