Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/64

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La panne dure ; malgré l’ombrage, il fait chaud. Finalement, tout s’arrange et nous repartons, escortés des deux canots arrivés qui, appartenant à Thiébault, viennent nous aider à franchir le saut X. L’ensemble forme une véritable flotte, chose inaccoutumée sur la Mana et qui ne manque pas de pittoresque avec, debout à l’avant de chacun des canots, le bosman armé du takari.

Le saut X se découvre au soleil couchant, très joli avec un bondissement d’écume flamboyante, colorée diversement, et, les canots amarrés à l’embouchure d’un bistouri, nous débarquons sur une plage sablée couverte de bois mort et de laquelle part une piste aboutissant de l’autre côté du saut, longue de huit cents à mille mètres.

Dans le bistouri, Thiébault aperçoit un caïman ; il tire au fusil de chasse chargé de chevrotine ; le caïman bat l’eau de sa queue avec force et disparaît. Triomphant, Thiébault s’exclame :

— Je l’ai eu, il est mort !

Mais comment le rattraper ? Aucun Créole ni Saramaca ne s’y hasarde, les Européens restent cois… Alors Thiébault :

— Et vous Maufrais ? Allons…

allez-y, n’ayez pas peur, il est mort, et bien mort.

Bah ! pourquoi pas ? Me voici en tenue d’Adam et, armé d’un poignard, je plonge dans les eaux troubles, tâte le fond des pieds, puis, lorsqu’il me manque, plonge et cherche à voir quelque chose, tâtant chaque fissure de roche, avec d’ailleurs une certaine appréhension… rien ! Je respire un bon coup, remonté à la surface et soudain je le vois. Tout le monde crie. Il est à deux mètres de moi, la gueule ouverte, menaçant. Je ne me sens pas très bien. Il plonge, disparaît, remonte en surface, fuit sérieusement blessé, nageant sur le côté. Il se dirige vers les