Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/72

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toral elles-mêmes ne sont pas mieux loties : Saint Laurent meurt, Cayenne végète, Mana agonise…

On dit : « Les gens n’ont besoin de rien pour vivre, pourquoi travailler à ceci, à cela, pourquoi se donner du mal ? »

D’accord… alors laissons-les ; mais pourquoi se plaignent-ils — puisqu’ils n’ont besoin de rien — de l’indifférence des pouvoirs publics à leur égard, à l’égard de la misère dans laquelle ils se complaisent ?

En face de mon carbet, il y a un vieil homme qui vient pleurer pour avoir de quoi manger et quelques médicaments. Gentiment, sa commère est venue me dire :

— Vous savez, il pleure misère, mais dans sa case il y a une botte enterrée avec plus d’un kilog d’or !

Mardi 18 Octobre.

Il est tôt. Un Saramaca arrive…

— Capitaine ! you ka vini, ki mo fond Sophie !

Un créole anglais part à Didier (actuellement village Sophie). Il m’emmène. Mes bagages sont bouclés… en route !

Nous naviguons au takari sur la rivière Sophie, encaissée comme un tunnel, encombrée tous les dix mètres d’arbres morts, de broussailles, de bans de sable et de roches. Il faut naviguer avec prudence, la pirogue fait eau de tous les bords. Installé parmi les bagages, j’écope à l’arrière. L’Anglais dirige l’embarcation que le Saramaca propulse à l’aide d’une énorme pagaie faisant office de gouvernail. Un caïman plonge de la berge ; une poule de brousse s’envole pesamment.

L’air est vif, le soleil à peine levé quelque part derrière les arbres est noyé par les brumes. Après deux