Page:Maufrais Aventures en Guyane 1952.djvu/77

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pirogue, avec ou sans vivres, pourvu qu’ils soient armés et possèdent une pelle, une pioche et une battée, s’en vont loin vers l’intérieur des terres, toujours plus loin, faisant le coup de feu chez les Indiens insoumis, nomades — hantés par le désir de faire fortune, la faisant rarement mais tentant de la faire en véritables aventuriers.

Ici, rien de tout cela… malheureusement, car tout meurt en Guyane à cause de la simili-organisation y existant et entravant toute initiative. On connaît la loi quoique peu efficace et fort loin — on la respecte. Les commerçants ont leur patente et les hommes un permis pour leurs armes.

Mort le pittoresque, mort l’avenir ! New-York, avant d’avoir des buildings, était un Far West ; en Guyane il n’y a jamais eu de Far West, il n’y aura jamais de buildings parce que imposer l’ordre dans un pays neuf au lieu de laisser son évolution suivre normalement son cours, c’est conduire sciemment ce pays à sa ruine et faire avorter son développement.

Du désordre, naît l’ordre. Canada, Etats-Unis, Brésil…

pays neufs, pays riches, évolués ; tous ont eu ou ont encore, en certains endroits de leur territoire, un Far West. Il ne s’en portent pas plus mal et n’y voient pas de quoi rougir.

Enfin, tout ceci pour vous dire que les mineurs guyanais m’ont déçu. Si j’avais vu les mineurs de Lille, j’aurais eu davantage l’impression de vivre une belle aventure. Ici, j’ai vu des terrassiers.

Je suis parti avec deux frères mineurs ; le chantier est tout près de Sophie, à une demi heure de marche dans la forêt… Évidemment, pas de piste, à peine un tracé indistinct coupant des criques, des ravins.