Page:Maupassant - Fort comme la mort.djvu/197

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— Madame a déjà meilleure mine aujourd’hui.

— Vous croyez ?

— Oh ! oui. La figure de Madame est plus reposée.

La comtesse, sans s’être encore regardée, savait bien que c’était vrai. Son cœur était léger, elle ne le sentait pas battre, et elle se sentait vivre. Le sang qui coulait en ses veines n’était plus rapide comme la veille, chaud et chargé de fièvre, promenant en toute sa chair de l’énervement et de l’inquiétude, mais il y répandait un tiède bien-être, et aussi de la confiance heureuse.

Quand la domestique fut sortie, elle alla se voir dans la glace. Elle fut un peu surprise, car elle se sentait si bien qu’elle s’attendait à se trouver rajeunie, en une seule nuit, de plusieurs années. Puis elle comprit l’enfantillage de cet espoir, et, après s’être encore regardée, elle se résigna à constater qu’elle avait seulement le teint plus clair, les yeux moins fatigués, les lèvres plus vives que la veille. Comme son âme était contente, elle ne pouvait s’attrister, et elle sourit en pensant : « Oui, dans quelques jours, je serai tout à fait bien. J’ai été trop éprouvée pour me remettre si vite. »

Mais elle resta longtemps, très longtemps assise devant sa table de toilette où étaient étalés, dans un ordre gracieux, sur une nappe de mousseline bordée de dentelles, devant un beau miroir de