Page:Maupassant - Le Horla, OC, Conard, 1909.djvu/161

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Elle prit trois chaises contre le mur, les aligna devant le feu, y conduisit ses trois bonnes femmes, les plaça dessus, leur ôta leurs cannes et leurs châles qu’elle alla déposer dans un coin ; puis, désignant la première, une maigre à ventre énorme, une hydropique assurément :

— Celle-là est la mère Paumelle, dont le mari s’est tué en tombant d’un toit et dont le fils est mort en Afrique. Elle a soixante-deux ans.

Puis elle désigna la seconde, une grande dont la tête tremblait sans cesse :

— Celle-là est la mère Jean-Jean, âgée de soixante-sept ans. Elle n’y voit plus guère, ayant eu la figure flambée dans un incendie et la jambe droite brûlée à moitié.

Elle nous montra, enfin, la troisième, une espèce de naine, avec des yeux saillants, qui roulaient de tous les côtés, ronds et stupides.

— C’est la Putois, une innocente. Elle est âgée de quarante-quatre ans seulement.

J’avais salué les trois femmes comme si on m’eût présenté à des Altesses Royales, et, me tournant vers le curé :

— Vous êtes, monsieur l’abbé, un homme précieux, à qui nous devrons tous ici de la reconnaissance.